Somptueux Caravage! Cette exposition du musée Jacquemart André nous offre 10 toiles exceptionnelles, dont sept n’avaient jamais été accrochées à Paris. Elles proviennent essentiellement de musées italiens, à l’exception du merveilleux Joueur de Luth prêtée par le musée de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg. Ces œuvres sont accompagnées de toiles d’artistes contemporains, élèves, amis ou ennemis de Michelangelo Merisi, dit Caravage, qui se sont inspirés de son style novateur et qui l’ont même parfois copié. Au cours de sa courte carrière, il eut de très nombreux amis, riches, célèbres ou érudits, et autant d’ennemis. D’un caractère fougueux, violent et ombrageux, sa vie fut ponctuée de rixes qui le conduisirent souvent  devant la justice. Le 28 mai 1806, lors d’une bagarre il porta un coup d’épée mortel à l’un des protagonistes. Il dût fuir Rome pour échapper à une condamnation à mort.  Sa fuite le conduira à Naples, où sa peinture acquiert sa pleine maturité.  Il quittera Naples pour  Malte puis  la Sicile. Il finira par revenir chez ses amis de Naples, mais il mourra de maladie à 38 ans sur le chemin de Rome, avant d’avoir retrouvé la ville de ses débuts.

Né en 1571, à Milan, il entre dans l’atelier d’un peintre renommé dès l’âge de 13 ans. Il y restera 4 ans. On le retrouve, à Rome au début de 1596, dans l’atelier de Giuseppe Cesari, dit le Cavalier d’Arpin, mais c’est à partir de 1599 qu’il va dominer son art en produisant des toiles comme le Joueur de Luth et Judith décapitant Holopherne pour des collectionneurs appartenant à la haute noblesse, proche de la papauté.  Caravage est un peintre qui va rompre avec le conformisme de l’époque en introduisant le naturalisme dans ses compositions, aussi bien profanes que religieuses, là où le maniérisme était de règle.

Il peint à partir de modèles pris dans son entourage, souvent de petites gens, ce qui lui fut reproché. Les personnages expriment ainsi une humanité qui accroche le regard. Riche de détails dans les premières œuvres, le décor des compositions est peu à peu dépouillé pour n’être parfois plus qu’un fond quasi uniforme qui donne toute son intensité à la scène, une intensité éclatante par l’introduction et la maîtrise du clair-obscur qui signe l’œuvre de ce novateur éblouissant. Ici, l’ombre et la lumière s’unissent pour donner une force exceptionnelle au tableau.

Les dix œuvres exposées dialoguent avec celles de ses contemporains  dans sept salles où elles ont été regroupées par thème. Nous découvrons ainsi Le Jeune Saint Jean-Baptiste au bélier (1602), Saint François en méditation (vers 1606), Saint Jérôme (1605-1606), Ecce Homo, Le Souper à Emmaüs (1605-1606), autant de chef-d’œuvres dont un seul justifierait la visite. Dans l’une des salles, nous avons la surprise de voir ensemble, pour la première fois, deux Marie-Madeleine en extase, l’une dite de Klain, et l’autre, découverte en 2015, qui n’a été exposée qu’une seule fois à Tokyo en 2016.

Francesca Cappelletti (Professeur d’histoire de l’art moderne à l’Université de Ferrare)  et Pierre Curie (Conservateur du Musée Jacquemart-André) sont les commissaires de cette remarquable exposition qui rassemble des œuvres maîtresses de ce peintre fondateur d’un style qui sera repris par de prestigieux successeurs comme Rembrandt, Georges de la Tour ou les peintres hollandais de l’école d’Utrecht.

Musée Jacquemart-André

158 Boulevard Haussmann, 75008 Paris.

Ouvert tous les jours de 10h à 18 heures, ferme à 20h30 le lundi.

Billets en ligne sur le site www.musee-jacquemart-andre.com.

 Plein tarif 16 euros, nombreuses réductions possibles.

L’exposition s’achèvera le 28 janvier 2019.

 

C. de Rouffignac, Rédacteur au Magazine « Lumières en Arts ».

 

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