Le cerveau n’en fait qu’à sa tête ! Cet organe est ainsi fait qu’il cherche à mettre du sens partout, même là où il n’y en a pas, ou bien il peut en faire trop en amplifiant des contrastes, en créant des contours,  des perspectives, des reliefs, des formes, des mouvements… Notre  rétine, composée d’éléments sensibles au rouge, au vert et au bleu et d’autres sensibles à l’intensité lumineuse, participe aussi à ces illusions. C’est sur ces propriétés dont il avait connaissance que Victor Vasarely va progressivement développer sa recherche artistique fondée sur la perception visuelle. C’est ainsi qu’est né l’art optique, « l’Op Art », dont on lui attribue la paternité. Le Centre Pompidou présente une exposition exceptionnelle qui retrace l’œuvre de cet artiste,  selon un cheminement chronologique et thématique.

A ses débuts, dans les années 30, Victor Vasarely se consacre à des études graphiques à partir de sujets figuratifs, dont la série des Zèbres constitue l’exemple majeur. Dans la décennie suivante, il va tirer du réel des abstractions surprenantes, comme ce fut le cas pour les galets de Belle-Ile-en-Mer ou bien la géométrie du village de Gordes. Puis viendra la période du noir et blanc, où il va introduire dans des assemblages de surfaces des déformations qui créent l’illusion de courbures, de reliefs, de creux ou de bosses dont la géométrie peut varier selon l’angle de notre regard. L’addition de la couleur va multiplier les combinaisons de graphismes possibles, d’autant plus que la perception d’une couleur donnée peut varier en fonction de celles qui l’entourent, en raison précisément des propriétés de notre rétine. Il crée ce qu’il nomme des « unités plastiques »,  essentiellement constituées d’un carré coloré, qui en est le fond, dans lequel s’inscrit une forme géométrique de couleur différente. Avec l’introduction de l’informatique, l’artiste va ainsi produire une somme considérable d’œuvres par le jeu de permutations des formes, combiné à la palette infinie du nuancier. Les illusions de reliefs vont atteindre leur perfection dans la série des cubes et des parallélépipèdes où la distribution des surfaces et des couleurs vont nous permettre, avec un peu de patience, de voir jusqu’à trois assemblages différents à partir de la même figure.

L’exposition s’achève par un aperçu de l’introduction de l’Op’Art dans le domaine des arts appliqués. Vasarely participe notamment à des illustrations de journaux, de couvertures de livres ou de pochettes de disques, rejoignant ainsi le Pop’Art naissant. Enfin les « unités plastiques » feront leur apparition dans le domaine de l’architecture, notamment en France, à Paris, comme à la gare Montparnasse, où à Aix-en-Provence avec le bâtiment de la Fondation Vasarely.

On doit au talent de Michel Gauthier et Arnauld Pierre le choix judicieux des œuvres qui marquent les étapes de l’évolution de l’Art de Victor Vasarely, parmi les quelque 400 000 œuvres de ce dernier.

Centre Pompidou, Place Georges-Pompidou (IVe). Tél.: 01 44 78 12 33. Horaires: tous les jours de 11 h à 21 h, sauf le mardi,  jusqu’au 6 mai 2019.

Christian de Rouffignac, rédacteur, et Léa Berroche rédactrice au magazine « Lumières en Arts »

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