L’Amour et les forêts
Genre : Drame
Pays : France
Durée : 1h45
Réalisatrice : Valérie Donzelli
Acteurs : Virginie Efira, Melvil Poupaud, Dominique Reymond
« J’aimais jusqu’à ses pleurs que je faisais couler. » Britannicus
C’est le cœur battant et le corps qui tangue que Blanche flanche et chavire sur la vague des mots doux de
Greg. Elle, si secrète, s’ouvre, se laisse porter, emporter, conduire par la main sans rien dire vers son
destin. Ce sont les jours de lumière, les petits riens deviennent des pages de promesses, cachant l’ouragan
de détresse à venir. Greg avance à petits pas, guettant sa proie, prédateur silencieux et vicieux. Elle se
croyait en sécurité, adorée, aimée. Elle ignorait jusqu’à quel point l’amour peut devenir une douleur. Il la
cajole, la séduit, l’isole, la coupe du monde et referme le piège sur sa proie. Est-ce de l’amour, de la haine,
de la jalousie ? Une chose est certaine, ce n’est plus le paradis, mais l’enfer dont il sera difficile de
s’extraire. Blanche comprend trop tard que le bonheur, le ciel bleu des beaux jours s’est enfui pour
toujours.
« Tu as de la chance qu’il t’appelle si souvent » collègue de Blanche (Romane Bohringer).
Valérie Donzelli excelle dans sa manière de décortiquer un événement, un sentiment douloureux comme
dans La guerre est déclarée. Elle adapte le roman L’amour et les forêts d’Éric Reinhardt en choisissant,
plus que la libération de l’avilissement d’une femme comme dans le livre, son long emprisonnement. C’est
le chemin pas à pas de celle qui croyait à l’impossible amour, en ignorant que « les histoires d’amour
finissent mal, en général ». La réalisatrice lui donne une sœur jumelle, un double, un reflet dans le miroir,
sa conscience peut-être. Elle détaille, comme dans La guerre est déclarée, la longue descente aux enfers,
la manipulation et les différentes étapes d’un stratagème infernal. Greg ressemble à l’amoureux idéal,
l’homme parfait du début de cette histoire, rencontré dans une fête. Très vite, les deux cœurs palpitent à
l’unisson mais, comme Janus, l’aimé possède deux visages.
Le plus sombre dort comme un démon en attendant le réveil sous le baiser de la princesse. Quelques
signes apparaissent dans la première partie, celle de l’isolement : un mariage discret, un changement de
lieu. Cette emprise pas à pas, mécanique, glaçante, fait froid dans l’âme. Nous quittons l’océan, matrice
des origines, pour le cœur des forêts profondes où rôde la bête. Elle ne tarde pas à se démasquer, par
petites touches, par des gestes, des mots qui lentement creusent la tombe de la belle. Il n’y a pas de
violence comme dans Jusqu’à la garde de Xavier Legrand en 2017. Tout est dans les mots, les vexations,
l’avilissement de Blanche. Derrière les portes d’un couple se cachent parfois des douleurs et des victimes
du silence. Il est trop tard quand elle se rend compte de l’emprise. On comprend mieux l’immobilité de
certaines victimes, comme le faon éclairé par les phares annonçant sa mort.
Le spectateur connait la vérité mais au début, doute malgré tout. Est-ce un homme trop jaloux, malade, ou
un pervers jouant de la peur et de la douleur de sa victime ? Blanche, comme dans le roman, ne sortira de
la nuit profonde, des flammes de l’enfer que dans le cœur des forêts. Elle devra repasser par l’amour pour
ouvrir la porte de sa prison et de nouveau espérer vivre. La mise en scène se teinte parfois d’une poésie
propre à Valérie Donzelli, d’un soupçon d’onirisme et de la flèche de Cupidon. C’est dans le silence, le
murmure des lieux, l’atmosphère insalubre de la peur que le spectateur trouvera les clefs. Le rouge de
l’amour, de la violence, de la rébellion revient souvent comme un marqueur. L’Amour et les forêts nous
interroge sur ce que nous faisons de l’amour, chant d’extase qui peut virer au cauchemar.
Patrick Van Langhenhoven
Lien Bande annonce : r43oX-4tuO8
Fiche technique
Titre original : L’Amour et les Forêts
Réalisation : Valérie Donzelli
Scénario : Audrey Diwan et Valérie Donzelli, d’après L’Amour et les Forêts d’Éric Reinhardt
Photographie : Laurent Tangy
Production : Alice Girard et Édouard Weil
Sociétés de production : Rectangle Productions ; France 2 Cinéma et Les Films de Françoise
(coproductions)1
Société de distribution : Diaphana Distribution
Budget : 5,83 millions d’euros3
Pays de production : Drapeau de la France France
Langue originale : français
Format : couleur
Genre : drame psychologique
Dates de sortie : 24 mai 2023 (Festival de Cannes et sortie nationale)
Distribution
Virginie Efira : Blanche et Rose Renard4
Melvil Poupaud : Grégoire Lamoureux4
Dominique Reymond : l’avocate1
Romane Bohringer : Delphine1
Virginie Ledoyen : Candice1
Marie Rivière : la mère de Blanche et Rose
Guang Ho : Tony
Laurence Côte : Catherine
Bertrand Belin : David
Nathalie Richard : la gynécologue