A partir du milieu du 18 ème siècle, L’Angleterre va connaître un essor économique florissant avec le développement industriel suivi de l’ouverture de nouveaux marchés, au Canada et aux tout nouveaux Etats Unis, et l’acquisition de nouvelles richesses avec la colonisation de l’Inde. Bourgeois et aristocrates s’enrichissent. Les artistes de l’époque, qui ne survivaient jusque-là que grâce à quelques commandes royales, vont s’adapter aux lois du marché en se pliant aux modes qui vont s’échelonner tout au long du règne de George III, de 1760 à 1820.

Joshua Reynolds et Thomas Gainsborough sont des peintres subventionnés par le Roi qui excellent dans le domaine du portrait, où la demande est forte. La critique les a souvent opposés, alors qu’ils se plaisaient à susciter des comparaisons, les portraits en pied de l’Honorable Miss Monckton de Joshua Reynolds, reproduit sur l’affiche de l’exposition, et de Lady Bate Dudley par Gainsborough, en sont une convaincante illustration. A leur côté, de nouveaux portraitistes talentueux émergent, comme Francis Cotes, Georges Romney ou Johan Zoffany. A la mort de Joshua Reynolds et Thomas Gainsborough, une nouvelle génération d’artistes s’impose avec un jeune prodige, Thomas Lawrence comme chef de file dont les œuvres, teintées de romantisme, annoncent un futur mouvement.

Au même moment les « Conversation pieces » trouvent un regain d’intérêt. Ce genre de portraits connait un franc succès. Il s’agit d’instantanés qui fixent, avec un grand naturel, une scène de la vie d’une famille ou d’un groupe d’amis. Les tableaux d’enfants, les scènes champêtres, les représentations d’animaux sont aussi très prisés. Un couple de chiens fox-hounds peint par George Stubbs en 1792, est un véritable chef d’œuvre qui attire immanquablement le regard. L’aquarelle est également remise au goût du jour. Ce sont des tableaux de dimension réduite, qui traitent de sujets d’une approche plus aisée, répondant aux demandes d’une clientèle plus modeste. Parmi ces artistes, figure Turner avec son étonnante vue sur  « Chamonix et le mont Blanc, depuis les versants de Montenvers ».

Les scènes historiques, qui occupaient le sommet de l’art pictural académique du 18 ème siècle, ne rencontrent pas la faveur de cette nouvelle société de consommation. Daniel Stringer nous laisse un autoportrait poignant de sa détresse devant une toile vide par manque d’inspiration. Ses peintures académiques ne se vendent pas. Ce talentueux peintre, reconnu aujourd’hui, achèvera sa vie dans la misère et l’alcoolisme. Pour plaire les scènes historiques doivent contenir une part de fantastique, de démesuré, elles doivent accrocher le regard. La « Destruction de Pompéi et d’Herculanum », de John Martin, est caractéristique de ce que demandait les amateurs de l’époque. Cet imposant tableau flamboyant achève la visite de cette riche exposition.

Commissariat : Martin Myrone, conservateur en chef à la Tate Britain et Cécile Maisonneuve, conseiller scientifique à la Réunion des Musées nationaux–Grand Palais

« De Reynolds à Turner. Chefs-d’œuvre de la Tate Britain ». Jusqu’au 16 février 2020, musée du Luxembourg, 19, rue Vaugirard, Paris 6e. Tous les jours, 10h30-19h, sauf le lundi, 10h30-22h. Téléphone 01 40 13 62 00, tarifs 9-13 €.S

Léa Berroche rédactrice au magazine Lumiètes en Arts

Fleuron

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