L’histoire commence dans l’ombre des ruines noires, champ de pierres et de terres brûlées où plus rien
ne pousse. Un petit bar perdu sans âme, oublié du monde, une veuve vend ses charmes pour quelques
sous et l’oubli en plus. Un enfant chapardeur et un jeune soldat, en quête d’une rédemption qui ne
viendra jamais, franchissent la porte de cette maison hantée par trop de douleur. La veuve bafouée par
trop d’hommes, le soldat bafoué par l’horreur des champs de bataille et le jeune innocent chercheront à
recréer une famille. C’est un rien d’espérance qui ne germera pas sur une terre stérile. Il ne reste plus
que le silence, l’enfer où retourner pour oublier que le paradis n’était peut-être qu’un rêve. Et l’enfant me
direz-vous ? C’est peut-être le seul qui pourrait retrouver l’ombre du feu au centre du foyer.

Shin’ya Tsukamoto a longtemps bousculé la société japonaise, chef de file du cyberpunk nippon avec les
remarquables Tetsuo et Bullet Ballet. IL revient avec un film profond sur la famille et la guerre, comment
l’une et l’autre ne peuvent pas construire un monde meilleur. Les deux adultes savent que la rédemption
est impossible. Ils sont trop marqués par la violence dans leur chair et dans leur esprit. Le film se divise
en deux parties, la première, minimaliste est centrée sur les visages, les corps, les mots, les blessures.
L’espoir devient une étincelle qui ne donnera pas une flamme mais s’éteindra à tout jamais. Ce lieu clos
étouffe les humains, prisonniers de leur enfer. La veuve pousse le petit garçon à le fuir à jamais. L’enfant
est une métaphore du Japon jeté à terre par deux bombes et une guerre sans pardon. Dans la deuxième
partie, le petit garçon suit un homme qui doit solder les comptes afin que l’espérance puisse devenir un
feu joyeux.

Le petit garçon quitte la caverne pour se lancer sur la route, en quête d’une étincelle de vie. Dans la
dernière partie, c’est au cœur des boutiques du marché noir qu’il exhume cette petite flammèche qui
pourrait devenir l’espoir. Le petit orphelin devra surmonter de nombreuses épreuves pour que sa quête
aboutisse et lui ouvre un nouveau chemin. C’est une métaphore du Japon face à ses démons qu’il
semble oublier et que l’époque pourrait bien lui rappeler. Julien Sévéon nous dit : « Shinya Tsukamoto
rejoint par son sujet les grands maîtres de l’animation, travaillés par le thème de l’après-guerre et de
l’impossible deuil (Isao Takahata avec Le Tombeau des lucioles ou Hayao Miyazaki avec Le Garçon et le
Héron). » Plus que cela, c’est aussi la violence de la guerre que le Japon semble avoir enterrée comme
un kami (esprit) destructeur en se voilant la face.

Comme le dit Shin’ya Tsukamoto « L’Ombre du feu partage les thèmes explorés dans mes deux derniers
films : Fires on the Plain et Killing. Comment la guerre affecte les gens. L’horreur abjecte d’ôter la vie.

Dans mon dernier film, je revisite ces thèmes à travers le chaos du marché noir de l’immédiat après-
guerre. Il s’agit d’un feu et des ombres en perpétuel mouvement qu’il projette sur son environnement. J’ai

porté toute mon attention sur les personnes qui habitaient dans ces ombres. Le titre provisoire du film
était ‘‘The Post-War Project’’. Alors que le monde s’éloigne de la paix, je me suis senti obligé de faire ce
film, comme une prière. » Une fois de plus, ce Diogène cyberpunk sans tonneau bouscule la bonne
conscience de la société japonaise pour lui rappeler que son avenir est construit sur un passé fragile.

Fiche technique

Titre original : ほかげ
Titre Français : L’ombre du feu
Réalisation : Shin’ya Tsukamoto
Scénario : Shin’ya Tsukamoto
Musique : Chū Ishikawa
Décors : Yoshiaki NAKAJIMA, MASAKO
Costumes : Sho Sasaki
Photographie : Shin’ya Tsukamoto
Son : Masaya Kitada
Montage : Shin’ya Tsukamoto
Production : Shin’ya Tsukamoto
Sociétés de production : Kajiyu Theatre
Société de distribution : Carlotta Films
Pays de production : Japon
Langue originale : japonais
Genre : Drame historique
Durée : 95 minutes
Dates de sortie : 1er mai 2024

Distribution
Shuri
Mirai Moriyama
Oga Tsukao
Hiroki Kono
Go Riju
Tatsushi Ōmori

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