Genre : Historique
Pays : France
Durée : 2h 52 mn
Réalisatrice : Magaly Richard-Serrano Acteurs : Anabel Lopez, Lizzie Brocheré, Bruno Debrandt
Le vent souffle sur la lande, les chants résonnent, s’envolent, caressant les vagues de l’océan. Les marins prendront bientôt la mer pour chasser la baleine, là-bas au bout du monde. Il faut apaiser les esprits marins, obtenir leur protection pour les grands lointains. Nous sommes au pays basque en 1609, une année marquée du sceau de Satan pour certains et la folie pour les femmes douées du don de guérison, les sorgines. Le bon roi Henri IV, celui de la poule au pot, saisi de cas de sorcellerie par les nobles du Labour, décide de mettre un terme aux agissements des filles du feu. Il choisit un magistrat de Bordeaux, Pierre Lancre, bien décidé à mener à bien sa mission. Les voiles se déploient sur le Levant pour se noyer dans l’océan. Pierre Lancre commence sa chasse sans merci, les femmes se cachent mais bientôt, les premières passent à la question. Gratianne, la mère de tous, sait que la tempête ne secoue pas que les navires en mer mais aussi les filles du feu ; aux savoirs anciens ; restées sur les terres. Les filles de la sorgine devront lutter ; chacune à leur manière. Jeannette devra accepter son destin avant qu’il n’engloutisse son monde. Catherine est une femme de conviction, à la tête de la plus grosse flotte de pêche. Morguy, la plus sincère, comprendra bien trop tard que le prince charmant cachait un démon. Un nouveau monde se lève sur le pays de France et de Navarre. Il n’est pas certain que les sorcières aient encore leur place.
« Leurs cheveux voletant sur les épaules et accompagnants les yeux de façon qu’elles semblent beaucoup plus belles en cette naïveté et ont plus d’attrait. […] Elles ont cette belle chevelure, tellement à leur avantage que le soleil y étend ses rayons ? L’éclat est aussi violent et forme d’aussi brillants éclairs qu’il le fait dans le ciel. […] Elles sont aussi dangereuses en amour qu’en sortilèges ». Les grandes heures [ou Les Grands jours] de la sorcellerie. Pierre de L’Ancre (1553-1631).
Longtemps, la sorcière a eu mauvaise presse dans notre imaginaire. Fille du feu, maitresse de Satan s’unissant au bouc, ne donne pas une bonne image. Pourtant, pendant longtemps, elle est surtout la guérisseuse, la sage-femme. Elle garde encore le secret des plantes et des potions miraculeuses. Le Moyen Age se soucie moins des sorcières. On en brûle quelques-unes sur le bûcher. On la passe à la question mais il faudra attendre la renaissance pour qu’elle devienne un fléau. C’est en 1275 que l’on brûle la première, Adèle, pour non-respect du culte plus que pour l’exercice de la magie noire. Il faut attendre Nicolas Eymerich, né en Catalogne, avec un premier essai sur les sorcières le Directorium inquisitorum. Sur sa tombe on gravera Prédicateur de la vérité, Docteur de premier ordre, Inquisiteur intrépide. Pierre Lancre s’appuie sur Le Malleus maleficarum, ou « Marteau des sorcières » de deux Dominicains allemands paru en 1486.
Pierre Lancre, grâce à ses écrits souvent délirants, participera à l’hystérie de la sorcière maléfique qui envahit l’Europe. Aujourd’hui, la sorcière revient à la mode et de nombreuses jeunes filles s’en revendiquent. C’est le retour à la guérisseuse dans les pas du New Age moderne, et la tendance montante de prendre soin de son corps et de son esprit. Les scénaristes s’appuient sur la première campagne de Pierre Lancre en juillet 1609 pour bâtir une fiction mêlant la précision historique et la romance. Elles dosent avec subtilité les précisions historiques dans un récit plein de suspense. Elles s’appuient sur leurs trois personnages principaux, les filles de Gratianne, pour aborder la place des femmes dans le pays basque. Filles du feu devient un film féministe. Elles possèdent une position particulière au pays basque. Le siècle des Lumières leur réserve toujours la place de gardiennes du foyer.
Elles commencent à bouger dans les classes sociales élevées mais elles sont toujours interdites d’accès aux universités et au savoir. La mise en scène se glisse dans les demeures des marins, des nobles, les grottes des rites secrets. Elle prend le temps d’ancrer la nature dans le récit, nous rappelant le lien profond des sorgines avec celle-ci. Le paysage se déploie comme les voiles des navires, la mer marque les têtes de chapitre et les demeures des nobles, l’espace de la chasse, la trahison, du changement. Trois figures servent l’histoire, la Jeannette la guérisseuse, entre le druide et le chaman, la femme moderne, Catherine et l’innocente, Morgy. Il faut saluer le jeu remarquable des comédiennes et comédiens. En opposition, trois figures masculines, Pierre Lancre, le magistrat, l’Etat moderne qui s’annonce, Damien, le prêtre incarnant la religion, et le noble, Tristan d’Urtubie symbolisant un temps ancien qui ne veut pas mourir. Nous pourrions encore développer la richesse de cette série qui renoue avec l’âge d’or de la télévision.
Patrick Van Langhenhoven
Fiche technique
Titre Filles du feu
Réalisatrice : Magaly Richard-Serrano
Type de série Mini-série
Genre : Drame
Création Giulia Volli, Maïté Sonnet
Acteurs principaux
Angela Molina
Bruno Debrandt
Michèle Laroque
Marc Ruchmann
Nb. de saisons 1
Nb. d’épisodes 6
Données clés Durée 52 minutes
Production Stéphanie Carrère
Société de production Kwaï
Diffusion
Données clés Pays d’origine France
Chaîne d’origine France 2
Diff. originale 28 août 2023 – en production
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