Raoul, représentant en vin, déboule à Marseille pour découvrir comment sa fille est morte et
la venger. Cette dernière étudiait bien sagement dans la ville de toutes les cultures. Raoul se
lance sur la piste de la petite, dévoilant une autre facette. C’est une longue errance à travers la
cité sur les traces d’une enfant un rien mytho qu’il ne connaissait pas. Il pénètre dans un
univers punk rock, en marge.
Elle avait enregistré un disque avec ses copines, resté dans les tiroirs des disquaires, le groupe
s’étant dissous à sa mort. Raoul se marginalise de plus en plus, à l’image de la vraie
personnalité de sa fille. Il comprend tout ce qu’ils ont loupé ensemble, ce fossé qu’il essaie
aujourd’hui de combler. Il décide de remonter le groupe pour un dernier concert, en hommage
à cette gamine qu’il comprend de plus en plus, à travers sa balade pour un cadavre.

Marcia Romano, scénariste de talent, sort des sentiers battus pour nous proposer, avec le
musicien Benoît Sabatier, une réalisation dans l’esprit du cinéma underground de la grande
époque. On pense à John Waters pour ce brin de folie et d’improvisation dans un cinéma sous
LSD. Dès les premières images, le spectateur est plongé dans un monde marginal qui devient
de plus en plus surréaliste.
C’est une belle visite de la ville de Marseille, insolite, féminine et méconnue. Les deux
auteurs sont partis de la musique pour construire un film punk underground dans l’esprit de ce
cinéma musical que l’on voit peu sur nos écrans. C’est agréablement subversif et inventif,
même si parfois les scènes s’étirent, et que les figures pittoresques, complètement folles, nous
échappent.
C’est une galerie qui, parfois, tente de rentrer dans le rang mais revient toujours à sa vraie
nature. Raoul, père désespéré, erratique, se retrouve souvent dévêtu, marquant chaque
chapitre d’une descente qui transforme cet homme ordinaire en un punk surréaliste, à l’image
de sa fille.
Christophe Paou et Angèle Metzger sont remarquables et dévoilent une nouvelle facette de
leur talent. Dans la forme comme dans le fond, à travers les dialogues, nous sommes bien
dans ce cinéma underground subversif des années 60, enfants d’Hollis Frampton, Michael
Snow, Andy Warhol, et bien d’autres.
Un cinéma d’ordre sociopolitique que la contestation embrasera dans tous les domaines. Pour
les deux auteurs réalisateurs, c’était une autre façon d’aborder le deuil, la mort, sous un angle
inédit. Elle nous interroge surtout sur ce que les disparus nous laissent, à quoi se raccrocher
pour ne pas perdre leur présence.
Le burlesque est une autre marque de fabrique du film, à travers la peinture de la ville, mais
aussi sa galerie de personnages. Fotogenico ne vous prend pas par la main, mais demande de
le suivre jusqu’au bout de sa folie ordinaire, comme un conte de Charles Bukowski.

Patrick Van Langhenhoven


Fiche technique
Titre original : Fotogenico
Réalisation : Marcia Romano et Benoît Sabatier
Scénario : Marcia Romano et Benoît Sabatier
Musique : François Dub
Décors : Sirine Désiré
Costumes : Julia Didier
Photographie : Nicolas Eveilleau
Son : Frédéric Salles
Montage : Florence Bresson
Production : Frédéric Dubreuil, Sarah Derny et Thomas Carillon
Sociétés de production : Envie de Tempête Productions et Micro Climat
Sociétés de distribution : JHR Films
Pays de production : France
Langue originale : français
Format : couleur
Genre : Drame
Durée : 96 minutes
Dates de sortie : 23 mai 2024 (Cannes) 11 décembre 2024
Distribution

Christophe Paou : Raoul
Roxane Mesquida : Lala
Angèle Metzger : Tina
John Arnold : Lekooze
Bella Baguena : Brune
Venus Yaffa : Venus
Rayan Khennouf : Ismaël
Julie Leclerc


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