« Tu es vraiment le Colibri, tu dépenses toute ton énergie à rester au même endroit » Luisa.

C’est une histoire de l’amour, la mort, la vie dans son chant, du début à la fin. Dans un mouvement intemporel, la cinéaste mélange les allers-retours et détours dans les méandres de l’horloge de la vie de Marco. De l’enfance au dernier souffle, il stagne comme un colibri pour se maintenir sur place. Marco se souvient et nous emporte avec lui, à la rencontre du premier émoi, Luisa la jeune voisine. Marco gardera dans son cœur, et au fur et à mesure des retrouvailles, cet amour platonique fait de chastes baisers jamais consommés. Il épousera Marina qui, comme lui, a échappé au crash d’un avion par hasard. Ils auront une fille, Irène et une petite-fille. Les parents du colibri ne cessent de s’engueuler tout en s’aimant profondément. Le frère de Marco est parti pour l’Amérique, loin des souvenirs toxiques. Adèle, sa sœur s’est noyée lors de cet été fatidique et leurs vies ont basculé. Autour de Marco, surnommé le colibri, la vie s’envole, embrasse de multiples horizons, se noie dans la folie et l’océan, se perd dans le jeu, pleure et rit au miroir du monde.       

«Je t’ai menti, et toi tu as fait pire, tu m’as crue » Marina, la femme de Marco.Les vieux couples se souviennent des jours heureux, les jeunes se forment dans la moiteur d’une soirée impérissable. Ailleurs, une vie s’en va, noyée dans l’océan avec, en toile de fond, les aboiements des chiens. C’est la première image ouvrant les méandres d’une vie immobile. C’est celle de Marco, marqué par la perte d’une sœur plus âgée, choisissant de s’effacer du chant de l’existence. Les morts viendront à chaque fois marquer le temps qui file, laissant le colibri à faire du surplace. Les épreuves de la vie semblent vouloir bousculer cet homme qui déploie toute son énergie à ne pas se laisser emporter par les drames. Même son mariage est celui de deux survivants qui s’appuient sur le hasard pour tenter de construire une histoire fragile. Elle finit par exploser sous le poids de la folie et surtout d’un homme s’enfermant dans son quotidien pour ignorer la douleur. Autour de lui, ce sont des existences mouvementées à, commencer par celles de ses parents. Marco ressemble à ces rochers quand la mer se fracasse pour glisser sur leurs flancs. Les morts tracent une piste de souffrance, comme un chemin de croix auquel il tente d’échapper. C’est le jeu qui le conduit enfin à comprendre le sens de toutes ces années. C’est à cet instant, sur la fin de la route, qu’il bouge enfin pour le dernier voyage. Toutes ces tempêtes tourbillonnant autour de lui n’auront pas suffi à ébranler le vol du colibri. Quand la réalité est trop dure, vous vous défendez par l’imagination. Est-ce que la vie c’est essayer de remplir un cœur vide ? Il préfère un amour immobile, platonique, à son couple. Est-ce qu’il déteste à ce point le mouvement ?   C’est une belle fresque que nous offre Francesca Archibugi dans une mise en scène sobre et classique aux dialogues percutants. Elle s’appuie sur le jeu des acteurs, remarquables, à commencer par Pierfrancesco Favino le nouveau Marcello Mastroianni du cinéma italien. On se perd parfois dans les allers-retours du temps qui préfère suivre une ligne particulière et désordonnée, marquée par les morts plus que par les vivants. La faucheuse semble être le chant récurrent, comme si la vie et la mort n’étaient que le yin et le yang de notre passage sur terre, indissociables comme les deux faces d’une même pièce. Pour le philosophe, ce sont deux contrastes conduisant à l’harmonie, pour le comprendre il faut bien toute une vie.

Fiche technique
   Titre français : Le Colibri
    Titre original italien : Il colibrì
    Réalisation : Francesca Archibugi
    Scenario : Francesca Archibugi, Laura Paolucci, Francesco Piccol d’après le roman de Sandro Veronesi
    Photographie : Luca Bigazzi
    Montage : Esmeralda Calabria
    Musique : Battista Lena
    Décors : Alessandro Vannucci
    Costumes : Lina Nerli Taviani
    Production : Laura Paolucci, Domenico Procacci, Anne-Dominique Toussaint, Ivan Fiorini
    Société de production : Fandango, Rai Cinema, Les Films des Tournelles
    Société de distribution : 01Distribution (Italie) • Orange Studio (France)
    Pays de production : Italie, France
    Langue originale : Italien
    Format : Couleurs
    Durée : 126 minutes
    Genre : Drame
    Dates de sortie : 2 août 2023

Distribution

    Pierfrancesco Favino : Marco Carrera
    Kasia Smutniak : Marina Molitor
    Bérénice Bejo : Luisa Lattes
    Laura Morante : Letizia Carrera
    Sergio Albelli : Probo Carrera
    Alessandro Tedeschi : Giacomo Carrera
    Benedetta Porcaroli : Adele Carrera
    Massimo Ceccherini : Duccio Chilleri
    Fotinì Peluso : Irene Carrera
    Francesco Centorame : Marco Carrera enfant
    Pietro Ragusa : Luigi Dami Tamburini
    Valeria Cavalli : La mère de Luisa
    Nanni Moretti : Daniele Carradori
    Rausy Giangarè : Miraijin enfant
    Niccolò Profeti : Giacomo Carrera enfant
    Elisa Fossati : Luisa Lattes enfant
    Lorenzo Mellini : Duccio Chilleri enfant
    Matilda Grace Marini : Amanda Carrera
    Marlo DiCrasto : Violet Carrera

A lire également