nwastraightouttacamptonafficheUn film de : Felix Gary Gray (Que justice soit faite, Braquage à l’italienne, Négociateur)
Avec : O’Shea Jackson Jr., Corey Hawkins (Non-Stop), Jason Mitchell (Contrebande), Neil Brown Jr (The Walking Dead, Never Back Down), Aldis Hodge (The After Die Hard : belle journée pour mourir, The East)
Durée : 2h27
Distributeur : Universal Pictures
Sortie au cinéma : 16 septembre 2015

Compton, banlieue sud de Los Angeles. Terrain de prédilection des gangs et vivier intarissable de génies du rap. Douce osmose où les uns sont souvent les autres et inversement. La liste est longue, de Coolio et son célèbre “Gangsta’s Paradise” à The Game, en passant par Mc Eiht ou le petit dernier Kendrick Lamar. Mais ici il s’agit des pionniers, des parrains. Leurs noms ? Dr. Dre et Ice Cube, qui sont eux mêmes les producteurs de ce déjà mythique “NWA – Straight Outta Compton” ; car ce biopic, à l’instar d’un “8 miles” ne présente pas uniquement la genèse du groupe NWA composé également d’ Easy-E, Dj Yella et Mc Ren. C’est aussi et surtout la naissance d’un nouveau courant musical, le GangstaRap.

1986, Easy-E, jeune loup du non moins connu gang “les Crips”, fait de l’argent, beaucoup d’argent. Trafiquant de drogue prolifique, il décide, sur les conseils de Dre, d’investir dans la musique. Ainsi est né le groupe NWA. L’histoire aurait pu s’arrêter là. Mais c’était sans compter sur le talent de ces cinq “Niggaz Wit’ Attitude”. Deux ans plus tard, sort le premier album studio du groupe intitulé “Straight Outta Compton”. C’est l’un des plus grands classiques du genre, grâce notamment au morceau “Fuck Tha Police”, qui comme démontré à l’écoute et désormais à l’image, dénonce le racisme et la violence des policiers de la cité des anges.

Cette réalité dépeinte avec un vocabulaire haut en couleurs, valut de nombreuses censures et une vive polémique. Le résultat : Le F.B.I lui-même adresse une lettre de mise en garde à leurs auteurs leur garantissant une publicité sans égal et surtout l’album est l’un des premiers à être étiqueté par le logo “Parental Advisory”, Logo repris et détourné pour y agencer le titre du film sur l’affiche, titre reprenant le nom de cet illustre album. La boucle est bouclée.

De près ou de loin, beaucoup de choses sont évoquées dans ce film, leurs joies, leurs peines, leurs échecs, leurs succès, leurs haines, leurs amis, leurs ennemis. La ressemblance des acteurs avec les personnages qu’ils interprètent est un point essentiel, si bien que c’est le fils d’Ice Cube lui-même qui tient le rôle de son père.

Quel plaisir de découvrir la conception de morceaux monumentaux, la recherche des premières notes devenues tellement cultes que l’on en fredonne déjà l’air comme si l’on composait au côté de Dre. On assiste également aux premiers pas en studio de certains des artistes phare du milieu érigés au rang de légende pour certains. La dissolution du groupe, sa reformation, la trajectoire de chacun, la supposée descendance incommensurable d’Easy-E, sa maladie, sa mort. Film hommage à cet artiste décédé il y a 20 ans, hommage à ce groupe qui au début ne voulait que distraire la population de Compton. Donner une voix à leur quartier. Le sortir de l’ombre, y dénoncer les dérives policière en lui donnant une arme, la meilleur : la liberté d’expression.

Ce film est à ranger au coté des très bons “Menace II Society” des frères Hughes ou de “Boyz N the Hood” (où l’on y voit d’ailleurs Ice Cube) de John Sigleton. Loin d’être un clip de rap de 2h30 où les clichés s’enchaînent, F Gary Gray signe ici un film de société sur une communauté afro-américaine trop peu représentée dans le cinéma par de jeunes acteurs que l’on espère revoir dans de nouvelles productions.

Témoignage des nineties, film d’actualité d’hier mais aussi d’aujourd’hui, quand les émeutes de 1992 évoquées dans le film font tristement échos à ceux de Ferguson ou plus récemment à ceux de Baltimore. C’est bien connu, l’Histoire aime à se répéter et le succès indéniable du film marchant près de trente ans plus tard dans les pas d’un album certifié double disque de platine ne déroge pas à cette règle.

Julien Joanny

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